Un jour sans fin...

On est quel jour ? #25

6H du mat, j’ai des frissons…

Je me réveille

Je me lève

Je claque des dents, j'ai froid et il n’y a personne dans les couloirs.

Le petit déjeuner arrive après 7h30…

Et je fais quoi, en attendant que le jour se lève ?

Débarbouillage rapide, je saute dans mon fauteuil roulant, chaud bouillant, pour cette nouvelle journée... et me voilà propulsé au 3è étage sur la terrasse !

J’ai pris, au passage, un chocolat chaud à la machine. Une fois bu et une clope fumée, arrivent d’autres zombies amputés.

Certains étaient déjà là à 4h30.

Il faut dire qu’il y a qu’un seul distributeur de café (qui ne marche jamais) dans tout l'établissement de Ramsés en T.

Et lorsque la machine tombe en panne le week-end, toi, seul et dans l’impossibilité de sortir d’ici (et en plus il n’y a rien autour pour boire un café) : Tu es foutu !

Là, Ramsé.s (inutile de prononcer le S) devrait un peu penser à notre bien-être ! Deux distributeurs de café ne serait pas un luxe. Mais un par étage, serait un vrai luxe.

(Il y a que 4 étages, mais le 4è est petit, tant pis pour eux, au 3e il y a une machine, la seule). Donc 2 machines pour les 1er et 2è étage où je réside serait un luxe : vous prendrez bien un café M Ramsé.S ?

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Toujours en Bourbonnie

À une semaine de Noël, déjà les débats sont vifs dès 7H15 sur notre belle terrasse, qui ressemble à un estaminet du sud, défraichi.

Ramsé.s (sans le S) si tu nous écoutes, une terrasse plus accueillante serait un plus, avec un peu plus de chaises, de tables et un meilleur éclairage.

Note urgente

Je profite de cette histoire pour faire passer des messages, et donner des conseils d’amélioration de la vie quotidienne dans la clinique, depuis que j’ai appris qu’ils m’ont identifié comme l’auteur de ces chroniques Bourbonniennes. Et qu'ils la lisent... Mais je ne veux pas fayoter, une seule seconde.

On est bien ici. Non ? (Réponds : Oui, fada)

Donc, sur notre belle terrasse (voir photo) le débat s’envenime sur « quel réveillon tu prends ? » . Il est 7h15 !

Pour Noël, il y a ceux qui restent et puis, il y a les partisans du 31 décembre qui partent car : « Tu ne crois pas que je vais passer mon réveillon ici, avec lui qui dort jour et nuit sur son fauteuil roulant. Fada, il va s’endormir le 31 décembre pour se réveiller le 3 janvier. Tu parles d’un réveillon ? »

Il n’a pas tout à fait tort.

La discussion vire ensuite sur la vieille dame, Hélène, qui a disparu de la maison senior voisine, il y a un mois…

Et que l’on n’a pas retrouvée.

Hier deux drones ont sillonné notre ciel, et nous tous, en fauteuils roulants, étions aux premières loges sur notre terrasse en rang d’oignon. Pire que des concierges attentives et affreusement curieuses.

La vieille dame n'a pas été retrouvée.

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Le petit matin se poursuit par la kiné, que l’on appelle aussi la "gym" ou le « sport » parce que dire « kiné » : ça fait malade.

Curieusement ce sont les vieux qui disent ça.

Peut-être qu’un jour, ils nous diront qu’ils vont prendre des cours d’orchestique ! C’est du grec ancien pour parler de mouvements, de gym et de danses dans un théâtre.

Nous, notre théâtre s’appelle un « plateau technique » plein d’appareils pour devenir plus souple et faire les cent pas, dans cette salle des pas perdus.

Il y a aussi 4 couloirs avec barres latérales.

L’après-midi, cette espace devient une vraie cours des miracles pour seniors. Aujourd’hui sur cette zone, la moyenne d’âge devait frôler les 3000 ans, heureusement que la jeunesse des kinés et moi même, avons fait baisser cette moyenne.

En même temps, ces patients seniors ont tout connu : la télé en noir et blanc, la cassette audio et la stéréo, le minitel, les avions avec espace fumeur… ou encore Mickael Jackson : noir (F. Foresti) : c’est normal qu’ils boitent aujourd’hui !

Ils méritent bien leur terre promise pour répondre à la question sacrée du lieu : « lève-toi et marche » … Et ça marche… Ramsé.s fait des miracles. Mais non, je ne fayote pas.

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Toujours en Bourbonnie…

En photo, ma chambre qui ressemble à toute les chambres d’hosto … sauf que je suis seul et que ça coute un bras, mais je ne peux faire autrement... vraiment... (je vous raconterai un jour)

Au diner ce soir (les menus élaborés pour la semaine, je n’ai pas encore celui de Noël sont affichés devant le restaurant collectif) car, ici on fait la cuisine et on varie les plaisirs.

Sérieusement c’est bon, sauf les épinards cuits d’un vert caca d’oie dans l'assiette, tel qu’ils nous étaient servis à la cantine du collège ou du lycée : non, tout, mais pas ça M. Ramsé.S

Ici le personnel est top !

Même si je pourrais faire un top des infirmier.e.s du soir qui piquent le mieux. Pour éviter la phlébite, je suis piqué tous les soirs avec plus ou moins de bonheur.

Mais tous sont top à mon étage.

Mon pote patient au 1er étage s’est étonné, l’autre matin, de voir un « épouvantail » lui servir son petit déjeuner; « Con, elle avait les cheveux jaunes, habillée en rouge et plus elle a refusé de me donner de la confiture, car je suis diabétique ! La conne. »

Oui, mais elle avait peut-être raison car "t’as déjà perdu une jambe…"

Pour ma part, je vais bien, je n'ai plus de pansement et j’ai négocié un kilo en moins, après la pesée quinzomadaire… car j’ai pris 4 kg depuis 1 mois.

Écoeuré. Heureusement que ma cops salvatrice (elle se reconnaitra) a sauvé mon moral et ma nuit d’une obésité morbide virtuelle, qui a failli flinguer ma nuit. Elle m’a dit : « c’est du muscle ! ». Elle n’a pas tort car j’étais "décharné". Mais je trouve que mes nouveaux muscles sont mal placés. Pourquoi préfèrent-ils le ventre ?

Voilà, une journée ordinaire en Bourbonnie.

Le temps est venu d’aller me coucher dans ce lit télécommandé : tu montes, tu descends, tu t'inclines… comment veux-tu dormir ?

Et puis...

Plus tard...

Le jour va se lever

Ici, pour moi, ce sera :

Un matin comme les autres

Mais, inutile de rester debout, à tout prix

Car tout peut changer aujourd’hui...

C’est le premier jour... du reste de ma vie…